Ce besoin de rechercher la permission de manger et la réassurance des autres
 
															Je vous retrouve pour un nouvel épisode de podcast, un nouveau sujet : le fait de chercher la réassurance extérieure, chez les autres, lorsqu’on souffre d’un trouble alimentaire.
Je pense que c’est quelque chose d’assez fréquent. Et donc je me suis penché sur ce sujet.
J’ai fait un focus particulier sur la réassurance en lien avec l’alimentation, parce que lorsqu’on souffre de trouble alimentaire, l’alimentation prend tellement de place dans le quotidien… qu’il y a fréquemment une recherche de réassurance dans ce domaine. Mais si on réfléchit, ça ne concerne pas uniquement le domaine nutritionnel.
Je vais tout de même commencer par me focaliser sur ce besoin précis.
Rechercher la permission de manger : Pourquoi ce besoin ?
Raison physiologique
L’une des premières explications, elle est physiologique. Ton trouble alimentaire t’a amené à te déconnecter de tes signaux internes. À force de ne pas répondre à ta faim, et ayant peu d’énergie, ton corps ne mobilise plus l’énergie pour faire gargouiller ton ventre, te faire comprendre qu’il a faim… Car il n’obtient pas de retour sur investissement puisque tu n’y réponds pas. Alors, tu ne ressens plus ces sensations de faim, ni de satiété. Donc tu ne sais plus quand réellement manger ? Si tu as faim ou pas ?
En plus de ça, un trouble alimentaire fonctionne sur des règles strictes. Pas le corps. Donc, ton trouble alimentaire t’a appris que tu manges telle chose à telle heure telle jour. Mais ton corps, lui, ayant des besoins qui varient selon de nombreux critères… bah parfois, ça ne va pas lui suffir. Donc ton trouble t’envoie un signal (basé sur une règle stricte), ton corps t’envoie un autre signal (basé sur ses besoins réels). Et toi, au milieu de tout ça, tu es perdu : tu ne sais pas qui écouter? Ce qui est valable ? Ce que tu dois prendre en compte ?
Donc, tu cherches des réponses externes, et notamment, en demandant aux autres de te rassurer sur ce que tu dois faire, ou d’approuver ce que tu fais pour être sure que tu fais bien.
Raison n°2 : l’anxiété
C’est très commun de retrouver de l’anxiété à des niveaux assez élevée chez les personnes qui souffrent de trouble alimentaire.
Mais, la restriction alimentaire plonge également le corps dans un état d’anxiété profonde.
Donc les deux couplés… ça donne de très haute dose d’anxiété.
Et quand le corps subit autant d’anxiété, il se sent en danger. Donc, il cherche à se rassurer.
Alors, tu vas chercher de façon extérieur à apaiser ton anxiété puisque toi, seule, tu ne parviens pas à te rassurer.
Raison n°3 : le perfectionnisme
Il forme souvent un trio avec le TCA et l’anxiété : le perfectionnisme.
Tu es tellement perfectionniste, tu as tellement peur de décevoir, d’être jugé, d’être différente des autres, de pas faire comme il faut… que tu as besoin d’être rassuré sur le fait que tu fasses les bonnes choses, de la bonne façon.
Raison n°4 :
Bon en fait, ce n’est pas un trio, c’est un quatuor. Parce que dans tout ça, s’ajoute le manque de confiance en toi. Et oui, forcément, si tu ne crois pas en toi, si tu n’as pas confiance en tes propres capacités… Et bien tu vas être amené à demander une aide extérieure pour te rassurer.
La recherche de réassurance dans les troubles alimentaires
Et comme je le disais en introduction, la réalité c’est que cette recherche de réassurance ne s’arrête pas à la dimension nutritionnelle lorsqu’on souffre de TCA. À cause entre autres de ce que j’ai expliqué avant (perfectionnisme, manque de confiance, sensations internes altérées, anxiété…)
→ Réassurance sur le corps : “est-ce que j’ai grossi ? Est-ce que ce pantalon ne me serre pas trop ? Est-ce que j’ai pas gonflé aujourd’hui ? Est-ce que prendre X kilos en X jours c’est pas trop ?”
→ Réassurance sur les repas : sur la permission de manger mais aussi sur l’après : “Tu crois que j’ai trop mangé en prenant ça?”
→ Réassurance sur la santé : certaines personnes ressentent le besoin d’appeler le médecin à chaque nouveau symptôme
→ Réassurance sur l’activité physique : “Tu crois que c’est grave si aujourd’hui je n’ai pas bougé ?”
→ Et plus globalement, dans la vie quotidienne, pour des choix de vêtements, d’étude, de lieu de vie, même de fréquentation. ça peut vraiment prendre de l’ampleur…
D’où vient cette recherche de réassurance ?
Je l’ai dit auparavant, dans la première partie, mais, parfois, quand vraiment ça prend de l’ampleur, les causes peuvent être plus profondes.
- Origine psychologique profonde : quand tu as grandi dans un environnement où tout était commenté (notamment ton poids, ton apparence… Ce qui est commun chez beaucoup de personnes présentant des TCA) ⇒ Alors, tu as intégré inconsciemment que les autres savent mieux que toi ce qui est bon ou mauvais pour toi.
- ça peut être lié à la peur de grandir / d’être adulte ; et notamment la peur de ne pas réussir à assumer ses responsabilités d’adulte. Demander l’avis aux autres, et parfois c’est beaucoup à ses parents, à sa mère… c’est une façon d’éviter les erreurs et de se dire “si j’échoue, c’est pas vraiment ma faute, c’est la responsabilité de l’autre”.
Chercher la réassurance : aide ou obstacle à la guérison ?
Dans un premier temps :
Oui, ça peut aider. C’est d’ailleurs un conseil que je donne aux parents et plus globalement aux proches d’une personne qui a des TCA : c’est de rassurer la personne, en répétant des arguments qui rassurent la personne et qui vont surtout contrer cette petite voix qui à longueur de journée leur rabâche des règles strictes.
Donc oui, parfois, chercher la réassurance, c’est nécessaire auprès de tes parents, de tes proches, de tes soignants ; pour poser les bases.
MAIS, sur le long terme…
Chercher la réassurance, c’est un frein pour la guérison. Pourquoi ?
- Parce que plus tu cherches la réassurance, plus ton cerveau en devient dépendant. Quand tu prends l’habitude d’être validé par les autres, si tu n’as pas la validation des autres, tu ressens comme un manque. Et tu en viens à ne plus savoir prendre des décisions seule.
- En plus de ça, à force de demander aux autres de te rassurer, tu envoie le message à ton cerveau “je ne suis pas capable seule, alors il me faut une validation externe”.
- Et donc tout ça, fait que ça renforce des croyances erronées. On en a déjà parlé plusieurs fois. Notre système de croyance se forme au grès de nos actions et de nos pensées. Au plus tu envoies ce message de “je ne suis pas capable” et au plus tu demandes la réassurance aux autres… au plus tu renforces cette croyance erronée de “je ne peux pas me faire confiance”.
- Et ça peut même devenir un TOC : c’est à dire que quand tu demandes de la réassurance à autrui, tu ressens un soulagement TEMPORAIRE. Mais l’anxiété revient de plus belle dès que tu ressens ce besoin de réassurance et elle est intense tant que tu n’as pas obtenu réassurance.
Concernant la permission de manger :
Pourquoi c’est un frein de constamment demander à l’autre si tu peux manger / si tu as assez mangé / si tu peux encore manger …?
- Parce que l’autre ne ressent pas tes signaux internes qui te sont propres. En effet, au début, les sensations de faim et de satiété ne sont pas encore revenus. Mais, à terme, elles se normaliseront et ce n’est pas quelqu’un d’externe qui saura dire quels sont les besoins de ton corps. Cette personne risque de faire des suppositions ou de se baser sur elle-même, et chacun a ses propres besoins. En fait, en faisant ça, tu vas te couper de ton intuition alimentaire.
- En plus de ça : tu ne peux pas demander toute ta vie la validation d’une autre personne. C’est juste pas normale… et tu vas forcément te retrouver dans des situations où tu seras seule à devoir prendre la décision, et du coup tu vas te sentir bloquée.
- En plus de ça, d’expérience (parce que pour le coup, moi j’ai eu énormément ce truc de rechercher la réassurance auprès de ma mère…). Bref, d’expérience, parfois, on cherche la réassurance via une tierce personne mais l’autre personne va répondre quelque chose qui va te stresser encore plus (même sans le vouloir. Parce que l’autre ne connait pas les mécanismes des TCA, ne connait pas ce qui va te trigger, etc.)
- Et il y a aussi des cas (et là je parle encore une fois d’expérience personnelle…), des cas où on sait ce qui nous rassurerait mais l’autre ne dit pas ce qui nous aurez rassuré. Donc en gros c’est la même chose que le point précédent sauf que là c’est le cas où on sait soi-même la réponse qu’on attend mais on préfère que ce soit l’autre qui le dise parce qu’on a plus confiance en l’autre qu’en soi).
Je vais vous parler d’une anecdote personnelle. Je crois que j’en avais parlé dans mon roman autobiographique. Lors de ma deuxième hospitalisation en TCA, j’étais épuisée. Et j’avais envie de mettre en pause ma vie, en l’occurrence, ma vie scolaire (j’étais en M2 en alternance). Et je voulais même quitter mon école (qui était une très grosse école de commerce) pour entrer en FAC. Et je parlais de cette décision à ma mère, sans dire franchement que je voulais arrêter, mais en lui expliquant mon épuisement… et la réponse logique (selon moi) était de dire “bah ok, arrête, met en pause un semestre, tu reprendras l’année pro, en FAC peu importe”. Sauf que, ma mère était inquiète sur le fait que je ne reprenne pas mes études, sur le fait que finalement, il ne restait plus qu’un semestre à tenir. En plus j’étais dans une bonne école, il y avait le côté “c’est dommage…” Et donc elle sous entendait que “est-ce que finalement, ce serait pas une bonne chose de finir une bonne fois pour toute ?”. Et moi, ça me stressait encore plus d’entendre cette réponse. La réalité, c’est que j’avais 21 ans, en âge de prendre une telle décision seule. Surtout que j’étais à 90% sur de moi. MAIS, je préférais que ma mère approuve cette décision. Et ça a duré des semaines… jusqu’à ce que je prenne la décision d’arrêter. Et finalement, un semestre plus tard, j’ai quand même repris dans l’école initiale puisque c’était plus simple quand même pour moi.
Mais tout ça pour dire que si j’étais sûre de moi, que je me faisais à confiance à l’époque, ça aurait évité une surcharge de stress, des questions à se poser par centaine à m’en donner mal à la tête, des pleurs, des disputes avec ma mère…
⇒ Donc bref, tout ça pour dire que c’est nécessaire d’apprendre à se rassurer soi-même.
Concrètement, comment faire pour ne plus demander cette réassurance auprès de l’autre ?
Déjà, une chose importante à garder en tête, c’est que quand je dis ça, ça ne veut pas dire que le but c’est de se débrouiller seul en toute circonstance, de ne jamais demander l’avis des autres.
C’est normal dans certains cas et ça peut être même bénéfique, d’avoir l’avis des autres. Moi, je parle dans le cas où ça prend trop d’ampleur et notamment pour la réassurance qui concerne ton alimentation, ton corps, ton activité physique.
Demander l’avis des autres pour un gros projet, c’est normal, tant que ça ne te bloque pas.
Des pistes pour avancer sur la recherche de permission de manger extérieure
- La première chose c’est de te rappeler que manger, ce n’est pas un droit, c’est un besoin physiologique. Manger ça ne se mérite pas.
- Une deuxième chose, c’est que tu es la seule personne à savoir ce dont tu as réellement besoin & envie. Oui, tes envies comptent aussi ! Les prises alimentaires ne s’expliquent pas par tes dépenses, ni ce que tu as mangé auparavant.
- Il faut aussi que tu gardes en tête que ne plus demander la permission / la réassurance par rapport à ce que tu manges est un passage obligé de la vraie guérison. Tu ne peux pas, encore une fois, rester éternellement dans une permission donnée par quelqu’un d’autre.
Des pistes pour avancer sur le besoin de réassurance en générale :
- Identifier la peur derrière ce besoin de réassurance. Pourquoi tu as besoin d’être rassurée ? As-tu peur de perdre le contrôle, peur de grossir ?
→ Demande-toi ce qui pourrait se passer selon ton TCA si tu n’es pas rassurée ?
Souvent, ce sont des croyances erronées derrière ça (Si je ne bouge pas, je vais grossir. Si je ne fais pas de sport, je vais prendre que du gras. Si je mange entre les repas, je vais grossir…)
Et c’est pourquoi j’insiste si souvent sur le fait que dans la guérison des troubles alimentaires, il y a un vrai travail de déconstruction des croyances éronnées qui est nécessaire. Le dernier livre que j’ai sorti il y a quelques mois est littéralement un guide pour ça. ça s’appelle “Déconstruire les croyances erronées de ton trouble alimentaires” et je déconstruis 140 croyances erronées que ce soit dans l’alimentation, l’hyperactivité, le trouble en lui-même, le poids, l’apparence…
Et j’aurais beaucoup aimé avoir cet outil à l’époque. Je m’appuie le plus possible sur des faits logiques et scientifiques pour t’aider à te rassurer et à déconstruire ces croyances.
- Une autre piste, ça va être d’indiquer à ton cerveau qu’il n’a pas besoin d’être réassuré.
Pour cela, à la place de demander “est-ce que j’ai le droit”, répète toi des phrases comme “Je peux me faire confiance” ; “je suis en sécurité” ; “mon corps sait ce dont il a besoin. il veut mon bien” ; “je ne suis pas obligé d’avoir toutes les réponses”.
- Quand tu es à deux doigts de demander de la réassurance à quelqu’un, essai de te demander : est-ce que vraiment je n’ai pas déjà la réponse ? ET si tu y arrives, essaie de t’entraîner à ne pas demander, à t’exposer doucement au fait de ne plus demander. Je te parle pas d’arrêter du jour au lendemain évidemment .
- Pourquoi t’entraîner à moins demander ? Parce que se donner la permission soi-même, se rassurer… c’est un muscle que tu vas développer à chaque fois que tu te feras confiance à toi plutôt que de rechercher une réassurance externe.
- L’idée, c’est de commencer à s’exposer à des décisions non alimentaires et surtout avec le moins d’enjeux possible. Comme le choix d’un vêtement ou d’un truc dont toi-même tu connais en réalité parfaitement la réponse qui te rassurerait.
J’en profite pour dire que, au plus tu seras renutri, au moins tu auras ce besoin de rechercher la réassurance parce que tu auras beaucoup moins de peurs irrationnelles.
- Un autre conseil c’est d’éviter au maximum les comportements de vérification (que ce soit la pesée – j’ai déjà conseillé mainte et mainte fois de jeter la balance – que ce soit les checks corporelles avec le doigt, de se check devant le miroir…). Parce que comme je l’ai dit auparavant, les actions et pensées renforce des croyances erronées, donc forcément, au plus vous faites ces actions, au plus vous intégrez que vous avez besoin de réassurance externe.
- Évidemment, il y a également un travail à faire sur le fait de te donner le droit à l’erreur.
Au pire, tu te trompes ? et alors ? rares sont les actions irréversibles qui ont des conséquences sur des mois voire des années.
- Et enfin, en seule réassurance externe valable, je veux dire, qui n’est pas dangereuse en soi, ou qui ne t’enferme pas je trouve, c’est de t’appuyer sur la psychoéducation. C’est à dire de te rassurer avec des faits scientifiques. J’en donne pas mal dans mon livre justement sur déconstruire les croyances erronées du trouble alimentaire. Tu peux avoir un carnet où tu notes tous des faits scientifiques qui te rassurent pour les relire et bien les intégrer.
Par exemple, le poids peut varier de 1 à 3 kg en une journée selon : eau, hormones, digestion. Ces variations sont la preuve de la vie normale du corps.
J’espère que cet article t’a permis de te sentir compris, de te reconnaître et surtout de trouver des pistes de réflexion, voire des actions à mettre en place pour t’aider dans cette recherche de réassurance.
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