Les leçons de vie que j’ai apprises de mon anorexie
Dans ce récit, je souhaite vous faire part des leçons de vie que j’ai tirées de ma maladie. Ces prises de conscience, je les ai notées petit à petit dans un journal que j’ai tenu pendant mes 4 années de combat contre les troubles alimentaires. Je les relis encore de temps en temps, car je n’arrive pourtant pas toujours à les appliquer. Mais ce n’est pas grave, parce que je ne suis pas parfaite. C’est d’ailleurs l’une des leçons que j’ai tirées : l’imperfection est normale. Mais je vous laisse découvrir cela un peu plus bas.
L’anorexie est la maladie du contrôle. Chaque personne anorexique est différente et a une histoire unique. Mais on retrouve des traits de caractère commun chez ces patients : la peur de l’échec et de l’imprévu, le perfectionnisme, la crainte constante du regard des autres et évidemment, le manque incroyable de confiance en soi.
1. Acceptez les choses qui viennent à vous
L’une des premières leçons que j’ai acquises c’est d’accepter. Accepter les choses qui viennent à moi. Il est inutile de lutter contre le changement, car il est naturel et surtout indispensable pour évoluer. Imaginez si l’on vivait toujours à l’âge de pierre… Changez les choses que vous pouvez changer, mais acceptez le reste.
Personnellement, je réussis à accepter les choses en me disant que si elles arrivent, ce n’est pas un hasard. C’est qu’elles sont nécessaires pour moi, qu’elles vont me générer quelque chose de positif dans ma vie. Mon anorexie mentale n’a clairement pas été la période la plus glorieuse de mon existence. Pourtant, je suis prête à déclarer aujourd’hui que je suis contente d’avoir traversé cette période dans ma vie. D’abord parce que j’ai réussi à m’en sortir. Mais ensuite, car elle m’a apporté un tas de leçons qui me permettent d’avancer chaque jour dans ma vie, de la vivre différemment.
2. Les autres : les accepter, s’en détacher et communiquer
Il n’y a pas que les choses quotidiennes à accepter, il y a également les autres. Admettre qu’ils aient leur propre opinion et que même si elle est opposée à la nôtre, ça les regarde. Cela ne signifie pas qu’ils ont ou que j’ai raison, ça veut simplement dire qu’on est tous uniques. On ne peut pas changer les autres, en revanche, on peut modifier notre perception par rapport à autrui.
En parlant des autres, j’ai aussi réussi à me détacher du regard des autres, bien que ce ne soit pas tous les jours évident. Mais j’ai compris que l’opinion des gens ne définit pas ma réalité. Je dois apprendre à me faire confiance, à suivre mon instinct. Et quand bien même je me tromperais, ce n’est pas grave, je m’instruirai de ma propre expérience et je m’améliorerai la fois d’après. J’ai d’ailleurs dû, pendant ma maladie, me détacher le maximum des préjugés des autres, notamment des phrases que j’ai entendues et que je vous ai répertorié dans mon article concernant les phrases à ne pas dire à une personne anorexique.
J’ai aussi saisi que pour enrichir sa relation avec les autres, il suffit parfois simplement de communiquer. Parler, s’exprimer, dire ce que l’on ressent à l’autre. Cela parait tellement simple mais surtout essentiel. En effet, ce qui est évident pour vous ne l’est pas forcément pour l’autre. Et si l’on attend quelque chose de quelqu’un, il vaut mieux le verbaliser plutôt qu’espérer un comportement ou une parole en supposant que l’autre l’ait deviné.
3. Vous en avez fait assez
La prochaine leçon, j’ai pris environ 1 460 jours avant de l’inculquer réellement, soit les quatre années de ma maladie. Et j’ai enfin compris que non, la perfection n’existe pas et qu’il ne sert à rien de gaspiller son énergie pour chercher à atteindre l’inatteignable. « You are enough ». Je ne sais pas si vous connaissez cette expression anglaise. Cela signifie que vous en avez fait assez et que vous avez le droit de vous accorder des pauses, de prendre du temps pour vous. On a le droit de ne rien faire, d’uniquement s’allonger dans le canapé. Ce n’est pas possible d’être constamment à 100 %, de toujours tout faire dans les règles. Comme on dit, « le moins est l’ami du mieux ». C’est important de prendre le temps de faire une chose à la fois, de refuser de temps en temps certaines sollicitations, de se contenter des choses simples. Vous avez également le droit de ressentir des émotions négatives parfois, c’est juste complètement normal. Et c’est en outre plutôt rassurant, ça veut dire que vous êtes humain !
4. L’échec est le secret pour grandir
Autre chose qui fait partie de la race humaine : l’échec. C’est humain d’échouer. L’échec fait partie de la vie. On a même besoin de défaites pour se construire et progresser. Souvenez-vous de vos débuts dans la vie, vraiment les prémices de votre existence. Pour apprendre à marcher, vous êtes tombé. Plus d’une fois d’ailleurs, mais vous vous êtes toujours relevé. Et c’est comme ça que vous savez marcher aujourd’hui. Les échecs font partie de la vie, et nous aident à avancer. En fait, ils représentent le secret pour grandir.
Vous pouvez accepter vos failles, vos faiblesses. Vous n’êtes pas invincible, vous pouvez tomber, comme tout le monde.
C’est pareillement essentiel de parvenir à placer le curseur au milieu. Ce que je veux dire, c’est que tout n’est pas blanc ou noir. Il n’y a pas que des succès ou des échecs, il existe aussi des demi-succès. Et c’est primordial de savoir les savourer.
5. La seule chose que l'on dispose, c’est le présent
J’ai compris également l’importance du moment présent. La seule chose qui existe vraiment, c’est le présent ! Le passé est fini et l’on ne peut plus le changer. L’avenir, on ne peut pas le prédire. Rien n’existe si ce n’est le présent. Si l’on réfléchit bien, le passé est survenu au présent et le futur se produira dans le présent. Le présent est donc la seule chose que l’on a. C’est d’ailleurs en me concentrant sur le moment présent que j’ai réussi à entrevoir des instants de bonheur dans la pire période de ma vie. J’ai eu tant de belles attentions durant mes quatre années de maladie. Lorsque j’étais en réanimation, j’avais peu de visite. Une jeune soignante passait 15 minutes de son temps chaque jour pour discuter avec moi et me remonter le moral. Au moment où j’étais hospitalisée en TCA (Trouble du Comportement Alimentaire), une autre infirmière avait fait une vidéo de son fils de 5 ans pour moi qui disait « Mathilde, je suis sûre que tu vas t’en sortir, t’es la meilleure ! ». Une autre encore avait laissé un mot dans ma trousse pour me donner plein de courage. Je n’ai trouvé ce mot que 5 mois après, et il m’a tellement réchauffé le cœur. J’ai eu tant de petits cadeaux, de messages, d’attentions de ma famille, de mes amis qui m’ont soutenu dans l’instant présent.
6. Vous êtes la seule personne à pouvoir vous changer
L’anorexie est une maladie mentale. Les patients ne sont pas responsables et la volonté ne suffit pas à les sortir de là. Mais j’ai quand même appris une chose de ma guérison. C’est qu’il ne faut jamais rester dans l’attente, il faut provoquer du changement et ce changement peut venir que de nous-mêmes. Nous sommes la seule personne à avoir le pouvoir de transformer notre propre vie. Et même si l’on risque d’échouer, on se doit de tout tenter. Car en essayant une thérapie, on va peut-être rencontrer une personne qui va nous aider d’une autre façon, ou comprendre un des facteurs de la maladie. Il ne faut jamais cesser d’y croire. Il faut toujours être sûre qu’on y arrivera, qu’on se sortira de la maladie ou de n’importe quelle situation difficile que l’on vit. Agissez, et vous serez surpris de tous les changements que vous êtes capables d’opérer.
7. La nourriture, ce n’est que de la nourriture
Je voudrais aussi vous parler de l’alimentation. Bien que la nourriture ne soit que la conséquence de l’anorexie et non la cause, c’est l’obsession de tous les patients souffrants de troubles du comportement alimentaire : anorexique, boulimique, orthorexique, hyperphagique et j’en passe. Les préoccupations autour de notre corps et de notre alimentation sont grandissantes chez de plus en plus de personnes dans notre société, et de plus en plus jeunes.
C’est difficile, mais nécessaire de tenter de faire abstraction face à toutes ces normes qu’on nous impose. Il est nécessaire de prendre du recul. Manger ou ne pas manger ne va pas résoudre vos problèmes. Au contraire, cela peut en créer de nouveau. Si l’on ne s’alimente pas correctement, et vice-versa, les conséquences peuvent être désastreuses. Manger tel ou tel aliment ne fera pas de vous quelqu’un de bien ou de mal. C’est important de se détacher de toutes les croyances que l’on a sur la nourriture.
8. Votre poids et votre corps ne définissent pas votre valeur
C’est parfois difficile de me le remémorer, mais la vie ne se limite pas à l’apparence. Non, le chiffre qu’affiche la balance ou le nombre indiqué sur un mètre ruban ne définit pas votre personne. Il ne sert à rien de tenter d’atteindre des nombres précis. De quoi avez-vous envie qu’on se souvienne de vous ? De votre poids ? Des centimètres de votre tour de cuisse ? Pensez à ce qui est vraiment important, les choses qui vous caractérisent réellement.
Nous sommes dans une société visuelle, confrontés à des normes qui définissent ce qu’est la beauté. Avant de tomber dans l’engrenage de l’anorexie, j’avais commencé par un simple régime. Pourtant je n’avais pas de kilos en trop. Mais je n’étais pas bien dans mon corps. La société n’est pas l’unique coupable de ce régime, mais elle y a fortement contribué.
Dans le fond, je comprends pourquoi tant de gens se sentent mal dans leur peau. Quand bien même c’est en train de changer, les mœurs ancrées dans cette société prônent l’idée qu’une personne belle est mince. On entend, on voit, on lit partout les mêmes choses : les cures d’amincissement, les régimes detox, les pertes de poids fulgurantes en seulement deux semaines, etc. C’est impossible de passer à côté : les publicités à la télévision, à la radio, dans les clips musicaux, dans les magazines, dans les films, sur les réseaux sociaux… On est formaté inconsciemment à chercher à avoir le corps parfait. Alors on essaie tous, tant bien que mal, de suivre les mœurs et de rentrer dans le moule.
On ne va pas se mentir, une personne jolie physiquement est très attirante. Mais si cette même personne est égoïste, agressive, malhonnête, hautaine, machiavélique et j’en passe… Ce n’est pas une belle personne !
C’est l’âme et l’esprit qui définissent la vraie beauté de quelqu’un. Le poids, qu’il soit faible ou élevé ne va pas déterminer la valeur de quelqu’un. C’est important de ne pas se focaliser sur l’apparence, mais plutôt d’entrevoir la beauté d’un sourire, de la confiance, de la gentillesse, du partage…
Je sais que vous avez des complexes, on en a tous ! « Un ventre trop gros », « un nez qui couvre 80 % du visage », « un pied plus gros que l’autre », « les cuisses les plus grosses du monde »… Mais il faut également cesser de se focaliser sur une seule partie de votre corps. Déjà parce que vous amplifiez certainement votre vision de cette partie du corps tandis que personne ne la remarque. Mais aussi, car c’est essentiel de voir son corps dans son ensemble. Je ne parle pas du poids que pèse l’ensemble de votre corps. Non, le poids c’est un chiffre, et cela ne vous définit pas. Pensez plutôt à ce que votre corps vous permet de réaliser. Votre corps est unique, et il vous appartient. Un corps ne sert pas à être beau, bien sculpter et parfait. Un corps vous offre la possibilité de vivre, d’être en forme, de rire, de créer, d’accomplir vos rêves, d’être de bonne humeur, de partager de magnifiques moments avec les personnes que vous aimez et même de donner la vie !
Ce n’est pas facile de toujours appliquer toutes ses règles de vie. Mais ne vous inquiétez pas, accordez-vous le droit de ne pas être parfait, et de prendre le risque d’échouer. Vous en retirez vos propres leçons de vie !
Super article ❤️ Et qui fait du bien à tout le monde ! Merci
Très belle prose pleine de bon sens, facile à lire et pleine d espoir, hâte de lire le livre.
Régine de Peronne, Somme
Merci ! Ça fait du bien de te lire, ça redonne de la motivation et de la foi pour la suite 🙂
Mille fois mercis de nous faire part de tout ça, de dévoiler ton histoire, ta lutte contre la maladie, tes angoisses… Je garde espoir pour ma fille de 13 ans qui est suivie depuis plus de 6 mois et qui m’inquiète tellement